Le chef de l’État français goûte manifestement peu le fait d’avoir été représenté la tête décapitée sur une toile récemment exposée sur l’archipel.
Une œuvre d’art plutôt provocante exposée en Guadeloupe a déclenché une tempête judiciaire impliquant le plus haut sommet de l’État français. Le président Emmanuel Macron a décidé de porter plainte contre X en réaction à un tableau le dépeignant décapiter et récemment dévoilé sur l’archipel des Caraïbes.
« Un juge d’instruction a été saisi », a notamment déclaré, mercredi 5 février 2025, Caroline Calbo, procureure de la République de Pointe-à-Pitre, dans des propos rapportés par la presse française. Cette dernière précise que la plainte a été formulée la semaine dernière.
Le tableau mis en cause figurait dans une exposition au titre évocateur « Exposé.e.s au chlordécone » organisé le mois dernier au Centre des Arts de Pointe-à-Pitre, avec la participation de 44 différents artistes. Il montrait un personnage brandissant la tête décapitée du président français.
L’œuvre avait été décrochée avant l’annonce officielle de la plainte, d’après artistes ayant pris part à l’exposition cités par l’AFP, sans que l’on sache exactement la raison de cette décision.
Le chlordécone, une plaie toujours ouverte aux Antilles
Quoi qu’il en soit, son auteur a refusé de se prononcer sur la plainte par « manque d’informations » sur celle-ci, selon des propos rapportés par Le Parisien. Le contexte de l’exposition à l’origine du dessin concerne comme l’indique le titre, le chlordécone.
En effet, ce pesticide ultratoxique avait été utilisé sur place de même qu’en Martinique dans les bananeraies jusqu’en 1993, soit quinze ans après les premières alertes de l’OMS sur sa dangerosité et bien après son interdiction par d’autres pays, à l’instar des États-Unis.
Au grand péril d’une population adulte antillaise désormais à plus de 90% contaminée, et une région présentant l’un des taux de cancer de la prostate les plus élevés au monde, à en croire diverses études scientifiques sur le sujet.
Une œuvre à la lisière de la liberté d’expression ?
Un drame sanitaire que le patron de l’Élysée a semblé minimiser à en croire les principaux concernés, en déclarant en 2019 qu’il « ne fallait pas dire » que le chlordécone était « cancérigène ».
La colère s’est intensifiée en janvier 2023 lorsque les juges d’instruction chargée de l’affaire ont prononcé un non-lieu, pointant la difficulté de « rapporter la preuve pénale des faits dénoncés », « commis dix, quinze ou trente ans avant le dépôt de plaintes ».
Ce n’est pas la première fois que le président Emmanuel Macron intente une action judiciaire en réaction à une œuvre le dépeignant sous de mauvais jours.
L’enjeu, comme les fois précédentes, est de déterminer jusqu’à quel point le présenta tableau heurte les limites du sacro-saint droit à la liberté d’expression.